Le vendredi 15 septembre 2023, tous les élèves ayant choisi la spécialité Histoire-
Géographie-Géopolitique et Sciences Politiques (HGGSP) ont rencontré le docteur Arsène
Sabanieev, anesthésiste franco-ukrainien résidant à Lille.
Lors de la seconde invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 (la première étant
l’annexion de la Crimée par les Russes en 2014), il s’est tout de suite porté volontaire pour
fournir son aide aux postes médicaux sur le front ukrainien après voir mis sa famille en
sécurité. Depuis, il y a effectué quatre missions :
Les deux premières ont été faites avec la 103ème où il s’est occupé de soigner tous types
de blessures, allant de l’impact de projectiles aux blessures du quotidien dues aux difficultés,
même en dehors des lignes de front.
Pour sa troisième mission, il s’est retrouvé à Bakhmout, au Sud-Est de l’Ukraine, à
quelques mètres du front, dans un poste médical avancé où ils recevaient cent à trois cents
blessés par jour. C’est pendant cette mission qu’il a hérité du surnom de « Barman » car il
s’occupe des « cocktails » d’antalgiques injectés aux blessés pour atténuer leurs douleurs.
Pour sa quatrième mission, il était à un poste d’évacuation de blessés du front afin de les
ramener ensuite à l’arrière dans des zones sûres. Son travail consistait à récupérer les
blessés en ambulance et à les ramener au poste de secours où ils seraient soignés. Dans
cette ambulance, il y a un chauffeur qui connaît par cœur les itinéraires à emprunter pour
ne pas rouler sur un champ de mines, le passager avant porte un fusil pour défendre
l’ambulance en cas d’attaque et un médecin est là pour apporter les premiers soins aux
blessés.
Le docteur Sabanieev nous a permis d’en apprendre plus en répondant à toutes nos
questions sans jamais en éviter une seule. Nous avons pu apprendre que les relations sur
le front sont fraternelles, qu’il y règne un sentiment de partage, d’entraide et de camaraderie
malgré les conditions de vie difficiles et le risque d’attaque de drone, dans les zones arrière.
Mais aussi que les médecins qui soignent les blessés ne sont pas tous médecins ou
chirurgiens de formation. Il nous a rapporté que l’un des chirurgiens avec qui il a travaillé,
avait été mis à ce poste car il avait juste fait un stage dans un service de chirurgie avant le
début de la guerre. En raison de l’absence de tous les autres chirurgiens, ce médecin a été
réquisitionné dès le début de la guerre.
Il nous a expliqué que l’hygiène est peu présente : sur le front, ils se nourrissent de tout ce
qui reste dans les maisons abandonnées, se réfugient dans des caves en cas d’attaques.
Ils vivent 24h/24 avec leurs équipements composés d’un gilet pare-balles, d’un casque,
d’une trousse de soins et de quelques objets personnels. Ils dorment dehors dans les jardins
des maisons abandonnées, à même le sol. D’où l’importance de soigner les blessures du
quotidien.
Il nous a aussi fait part des nouveaux risques qu’il y a avec l’arrivée des drones sur le
champ de bataille car ils peuvent attaquer les zones arrière, sans s’attaquer auparavant à
la zone de front. Différents drones sont utilisés par les Russes, comme les drones Orlan,
qui repèrent les ondes téléphoniques et ainsi trouvent la position des troupes ukrainiennes.
Il nous a expliqué qu’une fois, un soir, il a entendu un drone arriver, il a demandé à son chef
si c’était l’un des leurs, mais son supérieur lui a répondu négativement. Ils ont alors mis à
l’abri les blessés et leurs équipements dans des caves, puis s’y sont réfugiés et quelques
heures plus tard, quand ils sont ressortis, ils avaient été bombardés. Ils avaient donc été
localisés par un drone. Les soldats qui sont proches du front doivent donc couper leurs
téléphones et tous leurs moyens de communication pour ne pas se faire repérer comme
eux avaient pu l’être. Des drones suicides sont aussi utilisés, pour que les Ukrainiens vident
leurs munitions sur ces drones, avant une attaque terrestre massive des Russes.
Roxanne Sakowicz, 1ère 4, groupe HGGSP 1
